Que faisons-nous en Afghanistan ?
Le président de la République a été clair à Fréjus lors de
la cérémonie d’hommage des deux marsouins tués en Afghanistan : la France « restera en Afghanistan aussi longtemps que
nécessaire. (…) Notre sécurité, ici, en France, repose aussi sur notre
engagement là-bas ». Le 25
août, il était intervenu sur les engagements français à l’étranger devant les
ambassadeurs réunis à Paris (discours du président de la République du 27
août à Fréjus et extraits du discours du 25 août aux ambassadeurs). D’une manière surprenante, dans son
éditorial du 27 août, la réaction du Monde a été « Afghanistan : la France en manque
de doctrine ». Le président n’aurait-il pas été assez clair ?
Certainement. Nous sommes en Afghanistan pour empêcher, avec
nos alliés, que les extrémistes talibans se réinstallent et créent une base
d’entraînement pour les futurs Djihadistes. Pourquoi interdire ce retour ?
Lisons rapidement les textes des théoriciens du Djihad et
donc d’AlQaida qui justifient les actions d’une grande partie des
insurgés afghans. :
- Ces
textes affirment avoir besoin d’une base d’entraînement car le combat contre
les chrétiens (ou croisés), les apostats, les juifs, les athées ne peut
s’arrêter tant qu’un califat musulman ne sera pas instauré, regroupant tous les
musulmans.
- Dans
ces écrits, la notion de frontières n’existe pas. Nous ne sommes pas « l’ennemi
proche » mais « l’ennemi lointain », cible ultérieure ;
- Le
pouvoir politique doit s’aligner sur la croyance en Dieu. La Chariah ou loi
islamique doit être instaurée ;
- Un
musulman ne combat pas un autre musulman, bien que les Djihadistes aient
justifié la mort d’autres musulmans. En l’occurrence, leurs actes ne sont pas
réellement condamnés par l’ensemble des musulmans, y compris en France ;
- L’occident
doit se soumettre et est l’ennemi par son attitude envers l’islam, ses libertés
contraires aux règles de l’Islam (femmes, polygamie, homosexuels…) ;
Les textes étant connus, le débat est donc ailleurs. Comment
dire aux musulmans, y compris français (mais sont-ils vraiment concernés, un
certain nombre servant sans problème dans les armées et appliquant le principe
de la laïcité) et que nous combattons des musulmans fanatiques animés par le
Djihad, certes minoritaires mais prosélytes y compris dans nos sociétés de
libertés. Les contextes politiques intérieur et extérieur ne s’y prêtent pas
beaucoup.
Le débat sur l’érection d‘une mosquée aux Etats-Unis à proximité
des tours du 11 septembre, le refus de Disney d’accepter des tenues religieuses
ostentatoires aux Etats-Unis qu’elles soient une Kipa ou un Hidjab (le Monde du
26), le débat sur la burqa en France, un ramadan de plus en plus présent en
France avec une publicité ostensible sur les produits hallal, un doute profond
d’une partie des Français sur la place de l’islam en France, sans oublier le
conflit en Proche-Orient qui s’impose par moment dans le débat national, où
ceux qui ne sont ni de confession juive, ni de confession musulmane, se sentent
pris en otages d’un conflit au premier abord religieux mais pas uniquement,
tout ceci nuit au message politique qui doit souligner le combat à mener à
l’extérieur et ne pas stigmatiser (mot très à la mode et utilisable pour tout)
les Français de confession musulmane.
En outre, dans cette période préélectorale en France, les
paroles doivent être mesurées surtout si par exemple le PS veut agir auprès des
Français d’origine immigrés, certes pas tous de confession musulmane, pour
qu’ils votent plus en 2012 en estimant que cela sera favorable à son candidat.
Dans ce contexte, comment expliquer la
stratégie française en Afghanistan (et non « l’absence de doctrine » comme le
dit maladroitement le Monde) aux citoyens français surtout si l’on ne veut pas
désigner l’ennemi pour des raisons de politique intérieure bien que le discours
aux ambassadeurs du 25 août soit beaucoup plus explicite ? La 9e commémoration
des attentats du 11 septembre est notre prochain rendez-vous avec l’islamisme
radical qui a aussi sa date anniversaire et nous devrons être vigilants.