Une pétition lancée sur http://www.hotel-marine-paris.org/ circule sur l'avenir de l'Hôtel de la Marine, place de la Concorde. Elle vise à éviter que ce patrimoine soit "confiée" au "privé".
Cependant, il ne faut pas oublier que ces ventes ont pour objet d'alimenter le budget de la défense et que celui-ci ne peut assurer un entretien coûteux de ce patrimoine historique. Faut-il pour autant brader ce patrimoine dans des conditions qui pourraient sembler douteuses (cf Le_Monde_du_6_janvier_2011, deux lignes discrètes en fin d'article)
Pour garder ce patrimoine, il faudrait donc lui trouver un usage utile pour mettre en valeur à la fois ce monument et pourquoi pas la Mer dans sa globalité pour rappeler que la France est (ou devrait être) aussi une puissance maritime.
« Appel à projets relatifs à l’occupation, la mise en valeur et l’exploitation de l’hôtel de la Marine, 2 rue Royale, place de la Concorde, 75008-Paris.
Magnifiquement situé sur la place de la Concorde, cet immeuble de prestige et d’exception à usage de bureau développe un SHON d’environ 24000 mètres carrés. ».
Lancé au début de décembre cet appel avait le 17 janvier 2011 pour date limite de dépôt des candidatures. Certains ont remarqué que non seulement on bradait, mais que c'était à la sauvette.
L’hôtel de la Marine qui aurait vocation à compléter la Maison de l’Histoire de France, place de la Concorde à Paris en face de l’Assemblée nationale, dans un esprit de coordination avec une dizaine de musées historiques peut encore échapper aux appétits de ceux qui ne permettront pas au public d’être enfin au contact de l’histoire nationale dans les lieux où elle s’est tissée dès la fin de la monarchie… Il est indispensable que soit respectées in situ ses collections mobilières, qu’elles soient protégées de la dispersion, de toute forme d’aliénation et même qu’elles y soient regroupées puisque -depuis des années- une part de ce patrimoine a peu à peu été détournée des lieux où le public devrait être appelé à le voir.
Immeuble de bureaux, ainsi masque-t-on d'une formule trompeuse une situation qui se perçoit néanmoins au travers des lignes suivantes :
« Avec le regroupement de ses services centraux sur le site de Balard, à l’horizon 2014, le ministère de la Défense rend disponible à la vente la quasi-totalité de ses sites parisiens. Compte tenu de son caractère historique et architectural unique, l’Hôtel de la Marine reste lui dans le patrimoine de l’État et doit bénéficier d’une opération innovante de valorisation par un opérateur privé....» Eh ! Oui ! Il s'agit d'un des plus importants monuments historiques de Paris et comme on ne peut l'aliéner par une vente, on a choisi de le céder par le moyen d'un bail emphytéotique c'est-à-dire d'un bail de plusieurs dizaine d'années dont les termes donneront des droits inusités jusqu'ici par l’État !
Ainsi, la République française est si démunie qu’elle met son berceau en location ! Croyez-vous que l'exagère ? Lisez, si vous en avez le temps, les lignes qui suivent :
La République française va-t-elle enfin être débarrassée de son passé ? Le futur locataire de l’hôtel de la Marine aura tout son temps pour effacer toute trace de la Ière République que la Royale - pardon la Marine nationale - n’est pas arrivée à rendre tout à fait invisible dans le palais-musée construit sous Louis XV, où Louis XVI l’avait logée en décembre 1789.
En effet, la République est, depuis le jour de la première réunion de la Convention, liée à l’hôtel de la Marine. Vous n’en saviez peut-être rien… car il semble que cet édifice ait été très volontairement tenu à l’écart des hauts lieux de la République. C’est pourtant sa plus ancienne maison. C’est à l’hôtel de la Marine que le savant Gaspard Monge, ministre de la Marine et des Colonies, élu par l’Assemblée législative au soir du 10 août 1792, a été en situation de préparer la déclaration qui fit retentir pour la première fois les mots de « République française » devant la nouvelle Assemblée nationale.
Ni la salle du Manège où siégèrent les députés, ni celle où, aux Tuileries, s’installa ensuite la Convention, n’existent encore.
Quelles que puissent être les opinions, on doit à l'Histoire et qui plus est au public, que les débuts du régime républicain restent accessibles dans les lieux que l’administration centrale de la Marine libérera vers 2014. Non point dans les fameux salons que convoitent des gens pleins d’idées de « valorisation financière », mais dans bien d’autres parties de l’immeuble, totalement ignorées du public, bien qu’elles soient tout autant son patrimoine.
Puis, sous la IIème République, c’est à l'hôtel de la Marine qu'un autre savant, François Arago, assisté de Victor Schoelcher, a préparé l’abolition de l’esclavage, établit le décret s’y rapportant et fait étudier sous l’autorité de Schoelcher les décrets d’application.
Enfin, parmi cent autres faits de la IIIème République, on peut inscrire Édouard Lockroy, ministre de la Marine et créateur de l’École supérieure de Guerre navale, méditant face au site de l’exécution de Louis XVI, sur le lieu où avaient été dressés les procès-verbaux de ce sanglant événement, préconisait - en disciple fervent de Victor Hugo dont il avait été le familier - l’abolition de la peine de mort.
N'y a-t-il pas à méditer sur ces quelques indications ? Seraient-elles des preuves du mépris de quelques organismes financiers pour l'Histoire de France et tout particulièrement pour la République ?