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Défense et République
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3 novembre 2008

Le renouveau de la guerre en Afghanistan

Situation

Depuis le 18 août 2008, la guerre en Afghanistan s’est installée peu à peu dans les familles françaises. Les embuscades se sont naturellement poursuivies contre la progression française dans la province de Kapica où l’OTAN a déployé les forces françaises. Un poste de missile anti-char a été perdu mais ce n’est pas « grave » dès lors qu’il n’y a pas de pertes humaines. Cependant, l’aptitude de nos soldats à passer du soldat humanitaire au soldat-guerrier n’est pas acquise. Les conditions du combat sont en outre particulièrement contraignantes. Même faire des prisonniers de guerre n’est pas possible car nous ne sommes pas en guerre et les détenus (au sens de la convention de Genève) sont remis à l’armée afghane. Pas gagnée la guerre de contre-insurrection ! Si l’on ajoute la faiblesse des moyens et des effectifs, il va falloir revoir le dispositif pour être une force crédible avec des résultats réels sur les insurgés.

Pendant ce temps, de nouveaux renforts américains soutenus par les deux candidats à la Maison Blanche arrivent en Afghanistan pour renforcer les 70 000 soldats de la coalition. L’armée de terre ajoute 3 500 soldats de la 10ème division de montagne renforcés de plusieurs milliers de sapeurs, de personnel du renseignement et de logisticiens. Le corps des marines envoie 2 000 hommes avec ses propres capacités de transport aériens.

Sur place, selon les journalistes occidentaux, les Afghans attendent la sécurité et blâmeraient les pertes civiles causées par la coalition (150 personnes mais 750 tuées par les Talibans en 2008). Les Talibans sont particulièrement aptes à la propagande. Soulignons quand même que les forces américaines ont réalisées plus de 600 raids nocturnes, opérations éminemment soumises aux bavures mais au bilan les pertes civiles sont faibles.

Les combats s’intensifient donc surtout avec des élections s’annonçant en 2009 et le début des opérations de recensement en Afghanistan.

Pourquoi s’engager plus ?

Et la France, comment peut-elle se vanter d’avoir un tel budget de la défense et une ambitieuse loi de programmation militaire pour les cinq années à venir si elle ne peut vaincre une insurrection ? Mais d’abord, qu’est-ce que vaincre une insurrection pour sortir de l’affirmation stupide « Il n’y a pas de solution militaire » entendue en permanence. En effet, fait-on la guerre pour seulement avoir une victoire militaire ? Il s’agit bien d’une victoire politique que l’on veut. En l’occurrence, en Afghanistan, nous ne voulons pas que les talibans extrémistes reviennent au pouvoir et qu’ils donnent une base arrière au terrorisme international. S’ajoute aussi la lutte contre la drogue. 10% seulement de l'héroïne consommée aux Etats-Unis provient d'Afghanistan, contre 80% de l'héroïne consommée en Europe.

Le retour de la contre-guérilla

Le combat contre les talibans remet en vogue la guerre antiguérilla, sur le modèle que l'armée française a connu en Algérie.

Le général David Petraeus, le nouveau patron du Centcom depuis le 31 octobre, le commandement central américain, qui supervise les opérations militaires à l'étranger en est bien convaincu alors que l'Irak et l'Afghanistan ont replongé les armées occidentales dans la contre-guérilla. Or la contre-insurrection a été théorisée notamment par David Galula, saint-cyrien atypique, dans un livre - Contre-insurrection. Théorie et pratique - paru en anglais en 1963 et préfacé par le général David Petraeus. Celui-ci a rendu la lecture de Galula obligatoire aux officiers en partance pour l'Irak. Comme toujours, nul n’est prophète dans son pays et les leçons de Galula ont été enterrées en France.

Une première règle sera donc de dissocier le front apparemment unique des Talibans. En effet, il faut distinguer les nationalistes des radicaux islamistes, les combattants étrangers djihadistes aussi tout aussi rejetés par la population locale. Il faut aussi prendre en compte les rivalités ethniques comme les interventions des trafiquants de drogue. Ceux-ci ont intérêt à ce que l’Afghanistan reste une zone de non-droit. L’acceptation le 10 octobre par l’OTAN de la demande du gouvernement afghan de contribuer à la guerre contre la drogue leur donnent le prétexte de combattre la coalition bien que elle était déjà bien engagée dès lors que l’Otan s’engageait vers le Sud de l’Afghanistan. La vision occidentale d’un front unique Taliban est donc partiellement faux, hormis que tous sont unis contre la coalition mais pour des raisons différentes. Il faut donc identifier les interlocuteurs influents parmi cette mouvance.

Les forces françaises au combat

Cependant il ne suffit pas de combattre l’ennemi. Il faut aussi en avoir les moyens.

Comme nous l’avions écrit il y a deux mois, l’équivalent d’une brigade devrait être déployé dans la zone française avec l’ensemble des moyens dont un chef militaire doit disposer pour rendre la vie difficile à un insurgé. C’est aussi la fin de la mutualisation des moyens militaires (mise en commun pour des raisons d’économie des moyens militaires au niveau de la coalition).

Cela signifie aussi une formation à la contre-guérilla ce qui n’est pas vraiment le cas en France.

Cela signifie rester plus longtemps sur le terrain (pas uniquement quatre mois) soit entre six mois et un an pour garder le contact avec la population et développer la confiance. Cela conduit à organiser le tuilage des unités, les permissions pour récupérer, enfin terminer la constitution d’unités de bric et de broc (la modularité).

Enfin, l’avenir est la formation, le déploiement et le soutien de l’armée afghane qui devrait passer de 65 000 à 125 000 hommes dans le cadre de l’afghanisation de la guerre. C’est son pays et sa guerre. Or sa volonté à gagner le conflit malgré les déclarations n’est pas convaincante. Nous serons donc présents longtemps y compris comme conseillers militaires.

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