La France et l'OTAN
Alors
que les ministres de la défense de l'Otan se réunissaient à Bruxelles, dans le
cadre du Conseil de l'Atlantique Nord, la question du retour de la France dans
l'organisation intégrée est à nouveau posée.
Il
y a deux manières d'aborder ce sujet: l'idéologie et le pragmatisme.. D'un
côté, des discussions quasiment théologiques, de l'autre une approche en termes
de coût et d'efficacité.
L'idéologie. Cette approche
réunit partisans et adversaires d'un retour dans l'Otan. Les adversaires,
nombreux à gauche mais également présents à droite, voient dans l'Alliance
atlantique l'incarnation du mal sous la bannière étoilée. Ils oublient un peu
vite que la France a toujours fait partie de l'Alliance atlantique, même après
le retrait de l'organisation militaire intégrée de 1966, et que la France est
un acteur majeur des opérations de l'Otan depuis 1996 (Bosnie, Kosovo,
Afghanistan). Les partisans d'un retour, moins nombreux à s'exprimer, ont un
porte-parole prestigieux en la personne du président de la République Nicolas
Sarkozy. Il souhaite "placer clairement la France dans la famille
occidentale", comme il l'a exprimé, par exemple, lors des vœux au
corps diplomatique. Les armées sont globalement favorables à ce retour, alors
que le Quai d'Orsay est plus réservé.
Le
pragmatisme.
C'est l'idée défendue, par exemple, par l'ancien ministre des affaires
étrangères Hubert Védrine. En clair: combien ça coûte et qu'avons-nous à y
gagner ? L'Otan de 2008 n'est plus celle d'antan, avec des forces pré-affectées
à la défense de l'Alliance. C'est essentiellement douze états-majors, qui
utilisent des forces nationales mises à la disposition au cas par cas pour des
opérations (Kfor, Isaf, Active Endeavour) ou pour des alertes (NRF).
Si
la France décidait de "réintégrer" complètement, qu'est-ce que cela
signifierait-il concrètement, au-delà de l'affichage politique ?
Actuellement, 110 personnels français dont deux généraux, sont "insérés"
dans la machinerie otanienne. Un plein retour nécessiterait une plus grande
participation aux états-majors, à un niveau comparable à celui des grands pays
européens - a priori environ 800 ou 900 personnes. Il s'agit, pour l'essentiel d'officiers.
En terme de masse salariale, un retour dans l'Otan pèserait l'équivalent
d'environ deux régiments d'infanterie. Ce n'est pas rien.
Par
ailleurs, la France contribue à hauteur de 7,5% au budget de l'Otan, soit 138
millions d'euros. En cas de retour, sa participation devrait augmenter. Si elle
atteignait le niveau britannique (11,2%), cela se traduirait par une hausse
d'environ 70 millions d'euros. Soit plus de quinze VBCI par an ou le prix d'un
Rafale. Ce n'est pas rien non plus.
Voilà
pour les coûts. Et l'efficacité ? La France pèsera-t-elle plus en étant
pleinement réintégrée ? Rien ne le prouve, ni d'ailleurs le contraire. On peut
estimer que la situation actuelle (un pied dedans, un pied dehors) donne
également un grand poids. La démarche diplomatique française repose sur l'idée
quel l'Europe de la Défense ne progressera que si la France rassure ses
partenaires européens sur ces intentions, en réintégrant pleinement l'Otan. C'est
un pari. Si, au final, il est perdu, il sera facile de le critique. Mais s'il
est gagné...
Chacun
voit ce que tu parais, peu perçoivent ce que tu es . Machiavel (le prince)